Devenir famille d’accueil : Ces enfants ne demandent que ça et c’est ce qu’il faut leur offrir - Famille d'accueil

Devenir famille d’accueil : Ces enfants ne demandent que ça et c’est ce qu’il faut leur offrir

Devenir famille d’accueil : Ces enfants ne demandent que ça et c’est ce qu’il faut leur offrir

Crédit photo: Getty Images
07 mars 2023 à 13:29
Temps de lecture5 min
Par RTBF La Première
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Être famille d’accueil, c’est accompagner bénévolement un enfant en difficulté, participer à son éducation, lui offrir un cadre affectif et éducatif qui tient compte de ses besoins, et surtout favorise son épanouissement. Mais il manque plus de 600 familles d’accueil en Fédération Wallonie Bruxelles. Comment devenir famille d’accueil ? Que vivent les familles d’accueil ? Pourquoi un tel manque en Belgique ?

Une famille d’accueil, c’est quoi ?

En Fédération Wallonie/Bruxelles, 7000 enfants sont éloignés de leurs parents à plus ou moins long terme et un peu plus de 4000 se retrouvent en famille d’accueil.

Une famille d’accueil, c’est un adulte, une femme ou un homme, en couple ou pas, avec des enfants ou pas, homo ou hétéro, ou encore une famille recomposée, explique Xavier Verstappen, directeur de l’Accueil familial (section de Bruxelles) et président de la Fédération des Services d’accompagnement en accueil familial.

C’est un adulte qui a envie de s’engager dans un projet solidaire au niveau de la société et qui pense qu’agrandir ou modifier son schéma familial peut permettre d’aider un enfant et de lui permettre de bien grandir.

Une réflexion à avoir, des conditions à remplir
Ce n’est pas une décision qu’on prend à la légère. Cela demande un temps de réflexion important, un cheminement avec le service d’accueil familial, pour voir ensemble si le projet rêvé correspond bien au projet réel qui peut être proposé.

Devenir famille d’accueil, c’est aussi accepter l’enfant avec toute son histoire. Il y aura des moments où l’enfant sera en colère, en dépression, où il ne comprendra pas, et où il faudra pouvoir bénéficier d’un accompagnement plus spécialisé.

Les conditions matérielles entrent aussi en jeu : il faut une chambre, de l’espace pour accueillir l’enfant.

Il faut surtout avoir de la disponibilité.

Dans le cas d’une personne seule, la question du réseau est importante, pour qu’elle ait la possibilité de passer parfois le relais et de trouver un équilibre de vie.

Des parcours souvent difficiles
A partir du moment où un enfant ne peut plus rester dans son milieu familial, une hiérarchie de mesures s’applique, de la part de l’Aide à la jeunesse.

La priorité va être d’aller vers la famille élargie, les familiers. Si ce n’est pas possible, on va vers les familles d’accueil et ensuite seulement vers la solution institutionnelle, explique Joëlle Piquard, du Service de l’Aide à la Jeunesse de Liège.

Il y a des familles d’accueil régulières, où l’enfant peut être confié. Mais c’est au niveau des familles d’accueil sélectionnées qu’on observe un réel manque, parce que le fait de s’engager dans un tel projet doit être pensé avec l’ensemble de la famille et de l’entourage, ce qui n’est pas toujours facile. Ces enfants que l’on confie ont souvent déjà vécu un abandon, de la violence, des situations dramatiques dans le milieu familial.

« Ce sont des enfants qui sont traumatisés, qui ont des parcours de vie qui sont limite pas réparables. Ce sont surtout des enfants qui sont en mode de reproduction. En psychologie, on appelle cela le processus de vérification : j’ai été abandonné par ma mère, c’est que je suis abandonnable et donc, toute ma vie, je vais mettre en place des choses pour être abandonné, pour vérifier ma croyance », observe Claudia, famille d’accueil.

L’accompagnement par des assistants sociaux et des psychologues, via les services d »aide à la jeunesse, est essentiel, parce qu’il s’agit d’histoires qui ne sont pas simples, précise Joëlle Piquard.

On met en place tout ce qui nous apparaît utile pour l’enfant, dans son cheminement. Mais aussi pour la famille d’accueil, pour qu’elle ne s’essouffle pas, pour qu’elle puisse rester bienveillante dans le lien avec l’enfant.

Laurence, famille d’accueil, témoigne : « Les enfants en institution sont des guerriers, ils ont vécu tellement de choses »

3 modèles de placement
Différents types de placement en famille d’accueil sont prévus, en fonction de la durée notamment.

Les familles d’accueil urgence, à court terme, soit pour une durée de 45 jours, avec une évaluation après les 15 premiers jours.
Les familles d’accueil de dépannage, pour une durée de 3 mois, prolongeable deux fois, donc jusqu’à 9 mois.
Les familles d’accueil à long terme, où l’enfant s’installe dans la famille et peut éventuellement y rester jusqu’à sa majorité. Avec la possibilité d’un retour vers la famille d’origine si les difficultés se résorbent, mais c’est extrêmement rare.
C’est pour le long terme que le manque est le plus criant, constate Xavier Verstappen.

Le projet est très beau, car c’est vraiment un lien d’attachement qui est développé et qui permet à l’enfant d’être totalement ou en grande partie sécurisé. L’essentiel est de permettre à ces enfants de se poser quelque part et de savoir que là, on peut être tranquille et grandir dans un quotidien qui est normal. Ces enfants ne demandent que ça et c’est ça qu’il faut leur offrir.

L’accueil pour tous les âges
Les services d’accueil cherchent des adultes qui ont des projets très diversifiés, pour aider des enfants de 0 à 17 ans, rappelle Xavier Verstappen.

« On pense que les gens ne savent pas qu’on cherche aussi des familles d’accueil pour des enfants de 12 ou 14 ans, voire plus. Si on a 50 ans, qu’on a une chambre de libre et qu’on a envie d’aider un enfant qui a 13, 14 ans pour arriver à ce qu’il termine sa scolarité, non pas en institution, mais dans un cadre familial, et le soutenir après ses 18 ans, toujours dans ce cadre familial, c’est aussi un très beau projet à construire. »

Le champ des possibles est ouvert et offre de très belles histoires.

Un témoignage fort

Après un parcours de violence familiale, C’est à l’âge de 8 ans que Corentin De Ron a enfin été pris en charge par une famille d’accueil, ainsi que sa petite soeur.

Il a fallu trouver sa place. Evidemment on a été bien entouré, il y avait beaucoup d’amour là-dedans, donc ça a facilité les choses. Mais c’est vrai que ça prend quand même un peu de temps. Et puis la vie fait le reste.

Aujourd’hui, Corentin De Ron est un enseignant épanoui. Il a écrit J’ai grandi en famille d’accueil (Ed. Un coquelicot en hiver), en signe de gratitude pour ses parents d’accueil et pour sensibiliser sur un sujet méconnu, que l’on voit souvent de façon négative.

« Je pense que tout ce vécu m’a construit. […] Ça définit la personne que je suis aujourd’hui. Et je suis fier d’avoir ce parcours. Je ne voudrais pas que ma vie soit différente. Je le porte. »

Un don de soi

Beaucoup d’amour, c’est ce qu’on retrouve dans de nombreux témoignages, mais beaucoup de difficultés parfois aussi. Certains enfants sont tellement marqués qu’il est très compliqué de créer du lien.

Toutefois, sur 24 suivis, il y en a 2 ou 3 qui sont compliqués et prennent beaucoup de temps, les autres vont très bien, souligne Xavier Verstappen.

Comme l’explique Claudia : « En fait, c’est à nous de nous adapter et pas tellement à lui. Nous, on doit l’accompagner et l’aider. Ce n’est pas un enfant de substitution. C’est vraiment un don de soi. »